Demandez à l’expert : Tonya Lagrasta

CAGBC Staff on juin 27, 2023

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En tant que responsable environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) pour les Services de gestion des biens immobiliers au Canada, Tonya Lagrasta fait progresser le leadership de Colliers en matière d’ESG et l’offre de services aux clients désireux de mettre en place des objectifs en matière de durabilité et de les atteindre. Tonya a dirigé l’intégration interfonctionnelle de pratiques ESG innovantes dans de multiples secteurs, notamment la gestion immobilière, le conseil et la vente au détail, ce qui lui confère un point de vue unique pour donner des conseils sur les pratiques exemplaires de l’industrie. Elle nous a récemment accordé un entretien sur son approche de l’intégration ESG dans les pratiques commerciales du secteur immobilier.

Vous avez réussi à démarrer votre carrière en durabilité dès votre sortie de l’université, à une époque où les concepts de durabilité n’étaient pas encore au cœur des préoccupations des entreprises. Pouvez-vous décrire l’évolution de votre carrière? 

Lorsque j’ai commencé ma carrière, le développement durable dans les entreprises était axé sur la gestion des risques et la conformité. Bien que j’aie eu la chance de travailler pour une entreprise qui était en avance sur son temps en donnant la priorité aux initiatives environnementales, sociales et de gouvernance (ESG), les entreprises considéraient principalement la durabilité comme un coût qu’elles n’étaient pas prêtes à payer, plutôt que – entre autres – comme un investissement qui avait le potentiel d’augmenter le rendement et la valeur de l’entreprise. Assise à mon bureau chez Husky Injection Molding Systems, il m’aurait été difficile d’imaginer l’ampleur et la rapidité avec lesquelles le développement durable est aujourd’hui intégré dans les stratégies d’entreprise. J’ai ensuite fixé des objectifs de réduction des émissions de carbone pour une entreprise internationale, mis sur pied la toute première stratégie de divulgation pour une entreprise nationale et je conseille actuellement de nombreux clients sur leurs plans de transition vers la carboneutralisation. Au fur et à mesure de l’évolution de ma carrière, le niveau d’intérêt, d’expertise et, oui, d’urgence pour de meilleurs résultats ESG dans tous les secteurs d’activité a également évolué.  

En tant que défenseuse de la rénovation des bâtiments, comment ciblez-vous les possibilités d’accélérer les rénovations? 

La modernisation est essentielle si nous voulons décarboner le secteur du bâtiment, mais elle n’est pas assez rapide. Avant de parler de rénovations précises, l’équipe des Services de gestion des biens immobiliers de Colliers se penche sur l’objectif final de nos clients – par exemple, zéro émission pour les émissions de type 1 et 2 d’ici à 2040 – et procède à inverser le processus pour y parvenir. Les rénovations sont un élément de cette stratégie et peuvent inclure des rénovations mineures, comme la modernisation des systèmes d’éclairage, des rénovations majeures, comme l’installation de robinets à faible débit ou de compteurs divisionnaires, ou des rénovations en profondeur, comme le remplacement des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation par des technologies renouvelables. Ce qu’il faut retenir des rénovations en profondeur, c’est la nécessité de planifier – idéalement au cours du processus de planification des investissements. 

Colliers a lancé un programme de jardins comestibles et pollinisateurs. Comment intégrez-vous les solutions climatiques axées sur la nature dans vos projets et comment vous rapprochent-elles de vos objectifs ESG? 

Comme le rapporte le Fonds mondial pour la nature (WWF), les solutions climatiques axées sur la nature et la restauration plus large du secteur des terres pourraient contribuer à hauteur de 30 pour cent à l’atténuation du climat nécessaire d’ici 2050 pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Notre environnement bâti peut et doit être conçu de manière à contribuer à la restauration de la biodiversité.  

Le programme de jardins comestibles et pollinisateurs de Colliers est l’une des principales initiatives stratégiques du secteur axées sur la nature. Dans tout le pays, le programme crée de nouveaux espaces communautaires, favorise le bien-être, fait progresser les objectifs de certification de la durabilité des bâtiments et améliore la biodiversité urbaine grâce à l’utilisation de plantes vivaces indigènes. Les jardins ont été lancés dans plus de 40 propriétés gérées par Colliers à travers le pays en 2021 et nous sommes maintenant en bonne voie pour passer à 80 sites en 2023.  

Le programme soutient non seulement le volet « E » de l’ESG, mais aussi le volet « S ». Chaque année, les jardins produisent des légumes et des herbes aromatiques qui sont donnés à des organismes alimentaires communautaires locaux. En outre, le programme a suscité un partenariat avec des établissements d’enseignement voisins, notamment le Durham College qui a soutenu la création de notre jardin sur un site industriel à Whitby. 

De plus en plus, les propriétaires reconnaissent le lien essentiel entre les rénovations profondes et l’amélioration des résultats ESG de leurs actifs. Comment déterminer l’ampleur des rénovations et des investissements nécessaires pour avoir un impact réel?  

Cela commence par une évaluation des besoins. Aux Services de gestion des biens immobiliers de Colliers, nous avons développé notre propre série de modules d’évaluation ESG afin de déterminer les risques et les occasions pour les bâtiments que nous gérons dans des domaines tels que la consommation d’énergie, les émissions et le bien-être des occupants. Le type et le calendrier recommandé pour chaque rénovation seront différents pour chaque propriété. Ce qui est nécessaire du point de vue de l’investissement est lié à l’ampleur et au rythme du changement requis pour atteindre les objectifs des résultats ESG de l’actif. 

Est-il possible de rendre à la communauté ce qu’elle a reçu, d’être socialement responsable, de respecter l’environnement, tout en restant rentable? 

Sans aucun doute. Il serait insensé de ne pas reconnaître que le changement climatique et ses conséquences pour la société ne seront pas coûteux pour les entreprises. La dévastation humaine et physique causée par la multiplication des incendies de forêt et des inondations dans tout le pays l’année dernière n’est qu’un exemple qui donne une idée des conséquences de l’inaction. Il fut un temps où la priorité accordée à l’ESG était considérée comme une « bonne chose à avoir ». Elle s’est rapidement transformée en permis d’exploitation. Aujourd’hui, beaucoup considèrent qu’il s’agit d’un permis de croissance. Dans les immeubles que nous gérons, par exemple, nous avons constaté que les locataires actuels et potentiels donnent la priorité à l’ESG dans leur prise de décision. Ici, la corrélation entre l’action et la rentabilité devient évidente. Cela dit, chaque stratégie ESG est différente. Dans le cas de nos clients, cela dépendra fortement du type de propriété, des objectifs à long terme du portefeuille et des dernières innovations sur le marché. Nous comprenons que l’objectif puisse être le même, mais que le processus sera différent d’un bâtiment à l’autre.   

Vous avez posé une question intéressante lors de la séance Modèles de financement alternatifs pour accélérer les rénovations (Alternative Financing Models to Accelerate Retrofits) que vous avez animée à Bâtir un changement durable, mais nous aimerions connaître votre point de vue à ce sujet : qu’est-ce que nous devrions faire et que nous ne faisons pas? Comment pouvons-nous être plus proactifs?  

Ce qui compte le plus en ce moment, c’est notre rythme. 

Nous savons que le parc immobilier actuel du Canada représente environ un cinquième, soit 17  pour cent, de l’empreinte totale des émissions du pays. Le taux annuel actuel de rénovation de la superficie des bâtiments commerciaux du Canada est d’environ 1  pour cent, les rénovations permettant de réaliser des économies d’énergie « superficielles plutôt que profondes », selon un rapport publié en 2021 par Efficacité énergétique Canada et l’Université de Carleton. À ce rythme, on estime qu’il faudra 71 ans pour rénover tous les bâtiments commerciaux et publics.  

En effet, le taux de modernisation doit tripler chaque année d’ici à 2025 et nécessitera entre 39 et 62 milliards de dollars par an dans le cadre des efforts déployés par l’industrie pour réduire les émissions de près de 40 pour cent d’ici à 2030. Cela signifie que nous devons rénover la quasi-totalité des bâtiments existants au Canada.

Il peut être difficile pour nos clients de savoir par où commencer. Toutefois, nos équipes séparent ce processus en différentes étapes et donnent la priorité à ce qui est le plus important pour un actif ou un portefeuille d’actifs. Nous mettons sur pied des plans de résultats ESG sur mesure qui répondent aux objectifs des propriétaires et des locataires, ainsi qu’aux attentes croissantes en matière de divulgation.  

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